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3 février 2018 6 03 /02 /février /2018 15:59
Pierre SOULAGES : La MAGIE du NOIR.

Décidément, je n’ai pas de chance avec RODEZ, j’ai toujours vu sa cathédrale sous la pluie ! Cette fois, j’y vais pour le Musée SOULAGES, mais les Cieux sont encore contre moi. Ce samedi 9 septembre, il fait froid et humide, comme si l’hiver s’annonçait déjà. Pas facile de photographier le Musée sous le parapluie, d’autant que je manque de recul pour avoir une vue d’ensemble satisfaisante. Je m’accroche tout de même, car je sais ce qui m’attend.

Le musée – du moins ce que j’ai pu photographier – est imposant et résolument moderne. Les formes géométriques aux arêtes aigües, presque coupantes, semblent posées sur le sol, comme si elles avaient glissé là. Je les trouve néanmoins en contradiction avec la peinture de Pierre Soulages qui est toute en vibrations et en douceur. La couleur rouille de l’édifice est belle. Peut-être une discrète évocation des œuvres au brou de noix ? Peut-être une transpiration du noir qui nous attend à l’intérieur ?

A la droite du musée, un ascenseur facilite l’accès. Ici, il ne s’agit ni de grêle, ni de neige, bien sûr. Seulement les minuscules gouttelettes éclaboussées sur l’objectif.

A la droite du musée, un ascenseur facilite l’accès. Ici, il ne s’agit ni de grêle, ni de neige, bien sûr. Seulement les minuscules gouttelettes éclaboussées sur l’objectif.

De l'esplanade, voici la passerelle qui permet d'accéder au musée.

De l'esplanade, voici la passerelle qui permet d'accéder au musée.

L’entrée du musée se trouve à droite. Je n’ai pas pu résister à la beauté des couleurs et de la perspective de ce lieu.

Pénétrons dans le musée dont le peintre lui-même a suivi l’installation. Tout d’abord, on est frappé par l’obscurité ambiante, juste éclairée par le film qui montre l’artiste au travail. C’est assurément un musée pas comme les autres, un musée qui donne à voir, mais aussi qui interroge. Les salles sont introduites par des affiches composées d’explications de l’artiste. Ces panneaux guident le visiteur dont le regard est peu à peu « initié » au geste même du peintre.

Pierre SOULAGES : La MAGIE du NOIR.

Pierre SOULAGES est né le 24 décembre 1919, à Rodez. Il commence à peindre très jeune et à 18 ans il se destine au professorat de dessin et se rend à Paris. Il prépare et obtient le concours d’entrée à l’Ecole nationale des Beaux-Arts. Déçu de l’enseignement qu’il reçoit, médiocre à son goût, il décide de rentrer à Rodez, non sans avoir fréquenté le musée du Louvre et découvert CEZANNE et PICASSO qui l’impressionnent.

En 1946, il s’installe avec son épouse Colette, dans un petit atelier à Courbevoie. Dès l’année suivante, il expose à Paris, au Salon des Sur indépendants, où il est remarqué par les peintres Francis PICABIA et Hans HARTUNG.

D’emblée, sa peinture se caractérise par des tonalités sombres et des mouvements vigoureux. Il n’appartient à aucun groupe d’artistes et ne propose ni représentation, ni message.

« Je ne représente pas, je présente ». Cette citation met fin à tous ceux qui cherchent « ce qu’a voulu dire l’artiste ». Non ! Il ne peut vouloir dire quelque chose, puisque seul le regard des autres fait de ses tableaux des œuvres. D’ailleurs, elles n’ont pas de nom, Pierre Soulages les désigne par la taille des toiles.

« Je ne représente pas, je présente ». Cette citation met fin à tous ceux qui cherchent « ce qu’a voulu dire l’artiste ». Non ! Il ne peut vouloir dire quelque chose, puisque seul le regard des autres fait de ses tableaux des œuvres. D’ailleurs, elles n’ont pas de nom, Pierre Soulages les désigne par la taille des toiles.

« L’œuvre vit du regard qu’on lui porte. Elle ne se limite ni à ce qu’elle est, ni à celui qui l’a produite, elle est faite aussi de celui qui la regarde. Ma peinture est un espace de questionnement et de méditation où les sens qu’on lui prête peuvent venir se faire et se défaire. »

Pierre Soulages

Pierre SOULAGES : La MAGIE du NOIR.

S’il explore le brou de noix avec ses transparences, ses variations de bruns, il est vite fasciné par la lumière que réfléchit le noir dont il inventera même le concept de l’ « Outrenoir ».

Il utilise toutes les techniques : eau-forte, lithographie, sérigraphie… tous les supports : papier, verre, toile… Ses outils préférés : les brosses des peintres en bâtiment qui permettent de tracer des lignes et des reliefs horizontaux, les couteaux creusent et poussent la peinture noire épaisse et luisante, créant des rebords d’où la lumière se niche et bouge avec les déplacements du « regardeur ». Il invente parfois ses propres outils. Sans cesse il expérimente, laissant libre cours à son inventivité, toujours guidé par sa recherche de la lumière, par contraste ou par transparence.

Voici un jeu de verticalité, horizontalité et reliefs. On voit bien que, ici, la lumière dépend de la position du photographe.

Voici un jeu de verticalité, horizontalité et reliefs. On voit bien que, ici, la lumière dépend de la position du photographe.

Ce récit est affiché au musée lui-même.

Ce récit est affiché au musée lui-même.

Une œuvre remarquable, à mes yeux.

Une œuvre remarquable, à mes yeux.

 C’est dans les reflets de la matière noire qu’il modélise à la surface de ses toiles, que de l’ombre surgit la lumière.

« Mon instrument n'était plus le noir, dira-t-il, mais cette lumière secrète venue du noir. »

J’ajouterai que cette lumière a peu de limites en intensité et elle remet en cause le graphisme même choisi par le peintre car elle peut apparaître et disparaître partout, éclatantes sur les crêtes en épaisseur jusqu’à s’assombrir au point de devenir ombre, obscurité, NOIR ! au fur et à mesure des mouvements non seulement du regardeur, mais de l’éclairage qu’il soit naturel ou artificiel. Ainsi la toile que vous avez sous les yeux, et qui apparait ainsi que je l’ai photographiée, semble une déclinaison de gris tantôt mats, tantôt argentés, avec un seul rectangle noir. Il faut dire que la toile fait face à une grande fenêtre. Néanmoins, selon l’endroit où vous l’abordez, elle est beaucoup plus foncée.

On peut visiter ce musée par curiosité, en néophyte. Il est rare de ne pas tomber sous le charme de cette immense œuvre (1500 tableaux recensés) que l’auteur nous donne à voir afin que nous la vivions à notre manière.

Le travail inlassable de toute une vie, consacré au noir et à la lumière, fait de Pierre Soulages le plus grand artiste français d'aujourd'hui.

Pour terminer, je laisserai la parole à au peintre :

« C’est ce que je fais qui m’apprend ce que je cherche. » Cette phrase est l’illustration parfaite de la prépondérance de l’acte, de la création, sur l’intention. D’ailleurs, elle me rappelle une citation faite il y a longtemps par Jean COCTEAU dans un journal du Dauphiné : « Selon la phrase si belle de PICASSO, MATISSE trouve d’abord et cherche après ».

Il ne peut y avoir de message dans l’œuvre qui, une fois réalisée, a son existence propre, totalement indépendante de celui qui l’a créée. D’où la nécessité de ne jamais lier l’artiste en tant qu’être et son œuvre, une tendance fâcheuse qui a largement hanté l’enseignement de la littérature. Quant à affirmer que l’œuvre ne devient œuvre qu’à partir du regard de celui qui la regarde, j’avoue ne pas en être totalement convaincue. Cela mérite réflexion.

Une chose est sûre, lorsque il décide de peindre, Pierre SOULAGES, ne sait à quoi ressemblera l’œuvre finie. La création artistique est pour lui, un « mélange de hasard de la matière et d’instinct ».

Pierre SOULAGES : La MAGIE du NOIR.

Imaginons le peintre en action :

Sur une toile posée au sol, il verse à l’aide d’une gouttière de la peinture bleue très liquide. La flaque dessine un fond sans limites précises qu’il travaille ensuite avec le noir. Il crée des transparences, des contrastes, des formes et des nuances. Pour lui, l’œuvre est achevée lorsqu’elle forme « une unité vivante et intense à regarder ».

***

En guise de conclusion : il faut aller visiter le Musée SOULAGES de Rodez pour rencontrer l’œuvre exceptionnelle de cet immense artiste. Mais aussi le Musée POMPIDOU à Paris qui possède des œuvres et toute exposition ou rétrospective ou autres musées d’art moderne.

Mes photographies restituent de pâles images des tableaux, destinées à informer et donner envie de mieux connaître. Je ne suis pas professionnelle, hélas ! De plus, il faut tenir compte de l’obscurité du musée et du fait que, si vous avez bien compris la démarche créative du peintre, ses œuvres ne sont pas faites pour être photographiées).

Il y avait à ce moment-là une exposition CALDER avec ses mobiles, stabiles et sculptures en fil de fer. Ce sera le sujet d’un prochain article. Merci de votre attention.

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